Assainissement écologique

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Direction Bricqueville-sur-mer dans le Cotentin pour un stage d’initiation à la phytoépuration (assainissement par les plantes).

Bassin de phytoépuration
Bassins de phytoépuration

Tout d’abord, quelques termes à connaître

Eaux usées : ensemble des eaux domestiques de la cuisine, de la salle de bains et des appareils sanitaires (hors eau des wc) après usage.

Epuration : élimination des impuretés des eaux usées par le biais de filtration, transformation des matières organiques… dans le but de rejeter ces eaux dans l’environnement sans risque de pollution.

Phyto : tiré du grec phyto signifiant plante, végétal

Phyto-épuration : système d’assainissement assurant l’épuration des eaux usées (donc hors eau des wc) faisant appel à des bassins de plantes aquatiques.

Assainissement : ensemble des mesures, travaux et équipements de collecte, d’évacuation et de traitement des eaux après leur usage.

Pouzzolane : roche siliceuse d’origine volcanique, faiblement agglomérée, friable et dont la couleur varie du gris au rougeâtre.

Roche pouzzolane
Grains de pouzzolane  © Abrahami

Contexte

L’homme moderne puise de l’eau potable dans la nature pour ses différents besoins (sanitaires, alimentaires, industriels, agricoles…), la rejette dans l’environnement après utilisation et épuration…

…puis l’homme la repuise, c’est un cycle. Nous re-consommons ce que nous avons rejeté.

  • Par exemple, je prends un antibiotique, je l’élimine, il se retrouve dans le cycle de l’eau.
  • Un bricoleur lave ses pinceaux dans l’évier, des tas de particules se retrouvent dans le cycle de l’eau.
  • J’égoutte mes pâtes, j’en laisse filer un peu dans l’évier, elles se retrouvent dans le cycle de l’eau.
  • Je fais laver ma voiture… je n’ose même pas imaginer tout ce qui repart dans le cycle de l’eau (métaux lourds, hydrocarbures).

Les systèmes d’épuration se retrouvent alors avec toutes sortes de particules à éliminer tentant de dépolluer les eaux au maximum avant de les rejeter.

Mais les systèmes actuels sont plus ou moins efficaces en fonction des molécules qu’ils rencontrent.

Les traitements hormonaux par exemple, font partie des molécules incassables rejetées dans l’environnement et probablement retrouvées intactes dans les eaux futures puisées par nos enfants, petits-enfants…

Si l’on considère que l’eau potable est une ressource précieuse qu’il faut préserver et qu’à ce jour, l’homme n’est pas capable de dépolluer complètement l’eau qu’il pollue, il serait bon d’agir en début de chaîne à savoir :

  • d’arrêter d’envoyer n’importe quoi dans les circuits d’épuration sans se préoccuper des conséquences ;
  • d’arrêter d’utiliser de l’eau potable quand des systèmes tout aussi efficaces existent sans eau potable voire sans eau du tout (récupération d’eaux de pluie pour les machines à laver, toilettes sèches…).

La phytoépuration est un système écologique efficace et esthétique répondant à ce besoin de préserver l’eau, l’environnement et l’homme.

Le principe

Les eaux usées sont envoyées dans une suite de bassins remplis de pouzzolane, de plantes aquatiques et de galets.

Ainsi, l’eau est purifiée en circulant d’un bassin vers l’autre.

Bassin dit vertical d'une phytoépuration
Exemple de bassin dit vertical d’une phytoépuration

Les bactéries présentes transforment les matières organiques en matières minérales assimilables par les plantes.

En retour, les racines des plantes fournissent de l’oxygène aux bactéries et diverses substances participant à la dépollution de l’eau.

La pouzzolane aère et retient les micro particules, les galets dynamise le circuit de l’eau.

L’eau arrive dépolluée en fin de cycle.

Les matières déposées en fond de bacs sont vidées (compost) après quelques années d’utilisation.

Règles importantes à observer

  • avant tout, chercher à réduire sa consommation d’eau (réducteur de débit, système de douche avec vortex…) limitant ainsi le nombre de bassins nécessaires à la phyto-épuration,
  • opter pour des toilettes sèches couplées à un compost ou pour un système séparé pour l’eau des wc si l’option des toilettes sèches et du compost n’est pas envisageable,
  • utiliser des produits d’entretien biodégradables et abandonner l’eau de javel et les produits chimiques risquant de polluer le système,
  • éviter d’envoyer des graisses, résidus et matières organiques dans les eaux (grille d’évier).

Les étapes

1. Mettre en place un filtre à paille proche de la maison

Utiliser un regard en béton de 30 X 30 cm avec couvercle dans lequel l’eau usée arrive de la maison et ressort vers le premier bassin.

Filtre à paille phytoépuration
Filtre à paille en début d’installation de la phyto-épuration

L’eau entrante se déverse sur la paille par un tuyau percé de quelques trous et ressort vers le premier bassin par le fond du regard.

Le rôle de la paille étant de retenir les particules susceptibles de boucher les tuyaux, elle est changée et compostée régulièrement (environ tous les mois).

2. Calculer le nombre de bassins nécessaires

L’eau restant environ 10 jours dans le système, il faut prévoir 2 m3 de bassins pour 200 litres d’eau par jour avec un minimum de 3 bassins. Pour 4 personnes par exemple, cela fait environ 5 bassins.

3. Créer les bassins

Les bassins sont des bacs agricoles étanches en plastique de type abreuvoir de 400 litres et 60 cm de profondeur. Le premier bassin, supportant plus de matières, sera choisi plus grand (600 litres).

Le bac est percé à environ 7 cm du bord supérieur pour créer un dénivelé et permettre le passage d’une manchette (bout de tuyau faisant office de raccord) et du tuyau qui évacuera l’eau vers le bassin suivant. Les tuyaux d’évacuation de l’eau sont en PVC de 40 mm.

Avant de remplir le bac, on installe 2 gabarits en plastique qui serviront de séparateurs lors du versement des galets et de la pouzzolane.

Pour le contrôle de l’eau, il faut prévoir un regard côté évacuation avant de verser les galets. Ce regard est un tube en PVC de 160 mm percé de petits trous.

Regard d'un bac de phytoépuration
Regard d’un bac de phyto-épuration

4. Installer les bassins

A l’aide d’huile de coude ou d’une mini-pelle, on procède au terrassement. Il faut prévoir un minimum de 5 cm de dénivelé par m3 de bassin.

Par exemple, pour 5 bassins, le dénivelé entre le premier regard et le dernier bassin est de 90 cm (soit 11% de pente).

Avant de poser chaque bassin de niveau, on met une couche de sable canal pour le calage, puis un géotextile de type Bidim.

Il est aussi possible de créer un drain avec des caillous à positionner avant le sable. Cela peut être utile en cas de vidange du bassin (petit bouchon de vidange existant au fond de l’abreuvoir).

5. Remplir les bassins

Le bac est rempli de pouzzolane (granulométrie 7/15) jusqu’à environ la moitié du bac. Puis le regard est inséré côté évacuation dans le gabarit prévu pour les galets. Les galets sont alors versés dans les gabarits en plastique.

Le reste de pouzzolane est versé et les gabarits sont retirés. On peut protéger le regard avec une petite grille très fine fixée avec un fil de fer, qui empêchera les escargots et autres intrus de s’introduire dans le système.

6. Planter les bacs

Pour chaque bac, on doit attendre qu’il se remplisse d’eau avant de planter (délai d’environ 1 mois pour le premier bac). Une fois ce délai passé, on creuse un peu la pouzzolane et on y dépose délicatement la plante (racines). 5 plants par m² suffisent. Après plantation, la plante est coupée rase et surveillée afin de ne jamais devenir trop envahissante.

Différentes sortes de plantes peuvent être utilisées. Par exemple, du jonc et de l’iris des marais dans le premier bassin. Du jonc, de la renoncule, de l’arum des marais, du carex panaché pour les bassins suivants. De la menthe aquatique pour le bassin terminal.

7. Entretenir le système

Une installation bien faite demandera un minimum d’entretien mais un entretien malgré tout. Les bassins devront être vidés, la pouzzolane lavée (à l’eau dans une bétonnière, par exemple), la boue résiduelle mise au compost en veillant à laisser un peu de boue au fond du bac avant de le remplir de nouveau de pouzzolane.

Cette maintenance est à prévoir après environ 2 ans pour le premier bassin, 4 ans pour le second, plus ou moins 7 ans pour le troisième… Le signe annonciateur d’un besoin de maintenance est la remontée de boue (vérifier le regard).

En cas de gel, le processus d’épuration s’arrête. Il est donc nécessaire de protéger les bacs avec un filet (voile d’hivernage) couvert de paille par exemple.

En hiver, même si les plantes sont fanées, elles forment un habitat pour les larves, les libellules… et il vaut mieux les laisser ainsi jusqu’au printemps.

Au printemps, il est bon de couper les plantes pour les faire repartir.

Précautions à prendre

Une phytoépuration étant un jardin aquatique, il ne supportera pas une sècheresse prolongée (absence prolongée des habitants).

Un bon emplacement pour l’installation doit répondre à plusieurs critères :

  • bénéficier de beaucoup de lumière (Sud),
  • être éloigné des arbres (feuilles étouffant les bassins),
  • être capable d’accueillir plus de bassins en cas d’agrandissement de la famille,
  • être cohérent par rapport à l’évacuation finale de l’eau après le bassin terminal (mare, puits perdu…)

Le coût

Voici une indication des prix des matériaux nécessaires à la réalisation d’une phytoépuration :

  • la pouzzolane, entre 110 et 120 €/m3
  • les galets, environ 250 €/m3

Soit pour un bac de 400 litres composé de 300 litres de pouzzolane et 100 litres de galets, un coût de 90 € de matériaux de remplissage.

Ce à quoi l’on doit rajouter (par bac) :

  • le bac de 110 € pour un 400 litres à 140 € pour un 600 litres
  • une manchette en PVC de 40 mm de diamètre, 7 €
  • un regard de 160 mm et du tube de 40 mm en PVC pour environ 25 €
  • le sable canal à 17 €/m3, soit pour 60 litres, environ 2 €
  • le géotextile à 1,20 €/m², soit 2,40 € pour 2 m² par bac
  • 2 plaques souples (plastique, tôle…) pour fabriquer les gabarits (600X400)
  • du grillage souple en PVC de 40 cm²
  • du fil de fer ou fil électrique 0,5 mm
  • pour le terrassement d’une installation complète, une journée de location de mini-pelle à environ 55 €/heure

Le prix d’une installation effectuée par un professionnel est estimé à environ 2 500 €.

Législation

Malgré son efficacité incontestable en matière d’épuration des eaux grises, la phytoépuration ne fait pas encore partie des systèmes d’assainissement reconnus par la législation française.

Néanmoins, la législation évolue et de nouveaux systèmes sont validés et intégrés régulièrement.

Il est sage de s’informer auprès de sa Mairie avant d’investir dans un système de phytoépuration afin de savoir si un tel assainissement pourra être validé par la Mairie et le SPANC (Service Public d’Assainissement Non Collectif) local et de continuer à suivre l’évolution de la législation afin de bien connaître ses droits.

Pour en savoir plus

Livre

Guide Eau Vivante
Guide sur la phytoépuration édité par Eau Vivante

Guide destiné aux personnes désirant installer ou faire installer un système de phytoépuration édité par Eau vivante. Prix : 16 euros.

Stages

Stage de 5 jours en Bretagne sur la Conception et l’Installation de Systèmes de Phytoépuration destiné à ceux qui veulent en faire une activité ou aux auto-constructeurs proposé par Savoir Faire & Découverte. Prix : environ 1 000 euros.

Stage d’une journée sur les Principes de Base de la Phytoépuration destiné à tous ceux qui veulent s’initier proposé par Bruno Lacroix d’Ecotaupi. Prix : environ 60 euros.

Remerciements

Merci à Bruno Lacroix de l’association Ecotaupi pour ce stage d’initiation à la phyto-épuration accessible à tous.